Les poèmes de Jules Laforgue

Un #lundipoésie avec un poème qui colle le tournis pour célébrer « L’hiver qui vient » de Jules Laforgue.
Ce poète français né en Uruguay ne vivra que 27 ans avant de mourir de phtisie. Il aura durant sa courte vie réussi à la fois à être le lecteur particulier d’une impératrice francophile de 71 ans et d’écrire des vers plein de spleen, d’énergie et de symboles.
Je me souviens encore avoir appris des extraits de ce poème en particulier au collège et de m’être lancée dans des déclamations au fond de mon jardin tellement ces mots me semblaient faits pour rouler dans la bouche…

Je vous en partage ici à peine la première moitié et je vous encourage vivement à aller en lire l’intégralité en ligne ou – même soyons fous – dans un livre !

« Blocus sentimental ! Messageries du Levant !…
Oh, tombée de la pluie !
Oh ! tombée de la nuit,
Oh ! le vent !…
La Toussaint, la Noël et la Nouvelle Année,
Oh, dans les bruines, toutes mes cheminées !…
D’usines….
On ne peut plus s’asseoir, tous les bancs sont mouillés ;
Crois-moi, c’est bien fini jusqu’à l’année prochaine,
Tant les bancs sont mouillés, tant les bois sont rouillés,
Et tant les cors ont fait ton ton, ont fait ton taine !…
Ah, nuées accourues des côtes de la Manche,
Vous nous avez gâté notre dernier dimanche.
Il bruine ;
Dans la forêt mouillée, les toiles d’araignées
Ploient sous les gouttes d’eau, et c’est leur ruine.
Soleils plénipotentiaires des travaux en blonds Pactoles
Des spectacles agricoles,
Où êtes-vous ensevelis ?
Ce soir un soleil fichu gît au haut du coteau
Gît sur le flanc, dans les genêts, sur son manteau,
Un soleil blanc comme un crachat d’estaminet
Sur une litière de jaunes genêts
De jaunes genêts d’automne.
Et les cors lui sonnent !
Qu’il revienne….
Qu’il revienne à lui !
Taïaut ! Taïaut ! et hallali !
Ô triste antienne, as-tu fini !…
Et font les fous !…
Et il gît là, comme une glande arrachée dans un cou,
Et il frissonne, sans personne !…
Allons, allons, et hallali !
C’est l’Hiver bien connu qui s’amène (…)
 »