L’aigle et l’ange, Julie Zeh.
Traduit de l’allemand par Jörn Cambreleng.
« Quand elle est partie, je sniffe sur la table de la cuisine ma première dose de coke depuis au moins cinq jours. Un feu d’artifice explose dans ma tête, la reconstitution pharmacologique de ma personnalité commence. Je regarde autour de moi et mon ventre se remplit de plaisir. Les objets sont posés dans la pièce exactement à leur place, révélant ainsi le sens de l’ordonnancement du monde, où j’occupe moi aussi ma place, où chaque chose est à sa place, même la mort de Jessie et une casse-bonbons comme Clara. »
Alors qu’un homme parlait au téléphone avec sa compagne celle-ci se donne la mort. A partir de ce moment traumatique le narrateur perd pied. Il s’isole, perd le sens du temps et semble devenir fou. Son seul lien ténu avec le monde est la voix d’une jeune femme qui anime une émission de radio nocturne où des personnes témoignent de leur histoire. Comme un dernier geste, il va aller à sa rencontre et lui raconter son histoire d’amour défunte.
Mais attention, tout ceci ne dit pas le décor de ce roman singulier ! Entre trafic de drogue, avocats ripoux et génocide dans les Balkans… cette histoire prend racine dans la douleur et la peur. Le narrateur consomme de la cocaïne comme s’il s’agissait de sa seule planche de salut et les hallucinations s’intègrent dans son récit faisant douter le lecteur. Tous les personnages sont perturbés et leurs comportements dangereux.
Un texte singulier donc : sombre, dur et très violent mais aussi nourri de sensibilité. Une écriture nerveuse et cynique, assez inquiétante qui a pourtant réussi à m’emporter et à rendre palpables les sentiments tordus du narrateur.
Merci @auxbonsmots qui, au détour d’un post en Février 2018 (si, si), a su me donner envie de lire ce bouquin ! Je l’ai cherché un long moment car il est épuisé avant, enfin, de le trouver en bouquinerie. Je suis contente d’avoir persisté, cette lecture n’est pas comme les autres.