Les filles d’Egalie, Gerd Brantenberg.

Traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud.
Editions Zulma

« L’inégalité de la nature repose sur l’incapacité de l’homme à accoucher, à donner naissance à des enfants. Ne pas avoir ce privilège signifie à son tour que l’homme a une fonction purement subordonnée dans la création de la vie fumaine. L’aventure d’un soir que nous avons connue vous et moi, elle y a de cela une éternité, illustre d’ailleurs ce propos à merveille. Nous pouvons l’affirmer sans peine et elle convient de le souligner. Au risque de me répéter : l’homme remplit une fonction tout à fait subordonnée. Si on se place du côté de la nature, l’homme n’a aucune prédisposition naturelle pour donner vie à la Femme, tout comme il ne peut ni préserver, ni maintenir, ni protéger cette vie. C’est sa destinée biologique, mademoiseau Tapinois.« 

En Egalie, la culture matriarcale règne en maîtresse. La Présidente travaille nuit et jour tandis que son mari s’occupe du foyer et des enfants. C’est bientôt le bal des débutants et leur fils adolescent – un grand garson maigre ne répondant pas aux critères de beauté masculine qui valorisent rondeurs et barbes soignées – s’inquiète de ne pas être choisi. Il porte depuis peu le soutien-verge (soutiv) et rêve de devenir marine-pêcheuse, un métier réservé aux femmes.
Ses aspirations frustrées le mèneront à questionner les principes mêmes du matriarcat …

Cette lecture m’a tricoté le cerveau à l’envers et j’ai bien aimé ça !
Entre l’écriture qui féminise systématiquement les termes et la description d’un monde littéralement opposé au nôtre (où les garsons se font agresser sexuellement, tentent d’échapper à la violence des injonctions matriarcales, s’allient en non-mixité pour réfléchir à leur avenir et trouvent parfoisdans l’homosexualité un amour sans domination), difficile de ne pas écarquiller les yeux en pensant que ce texte a été écrit en 1977.
J’ai parfois perdu un peu de mon intérêt pour le texte lorsqu’il se transformait trop nettement en manuel éducatif mais son humour acide m’a beaucoup plu.