Les nuages, Juan José Saer.
Traduit de l’espagnol par Philippe Bataillon.
Le Tripode
« C’est dans cette ville que j’ai compris pour la première fois, du fait d’y être revenu après bien d’années, que la part du monde qui perdure dans les lieux et les choses que nous avons désertés ne nous appartient pas, et que ce que nous appelons de manière abusive le passé n’est rien de plus que le présent coloré mais immatériel de nos souvenirs.«
1804, au cœur de l’Argentine. Un médecin convaincu par les débuts de la pyschiatrie décide d’ouvrir un établissement où les malades mentaux seront accueillis en toute discrétion et accompagnés avec beaucoup d’attention et de bienveillance. La réputation du lieu est excellente et le gotha politique ou religieux local se presse pour y faire accepter ses membres azimutés.
De nos jours, à Paris au beau milieu d’un été caniculaire. Un universitaire reçoit d’un collègue sud-américain un manuscrit à l’origine douteuse pour l’expertiser. Ce texte raconte comment l’assistant de l’aliéniste argentin s’est retrouvé à la tête d’un convoi de malades mentaux au milieu de la pampa avec pour mission de les amener sains et saufs dans l’établissement.
Sur cette base, les récits s’emboitent et se jouent les uns des autres.
J’ai adoré me faire balader par ce roman !
Quel plaisir d’être promenée ici ou là mais jamais comme je le prévoyais. Le dispositif du texte dans le texte est classique mais manié avec une virtuosité plaisante. L’écriture de Saer est d’une poésie incroyable, j’ai relu plusieurs phrases pour m’en délecter.
Pour que ce soit bien clair : quand je voulais à tout prix savoir la suite des événements, il m’embarquait dans des digressions magiques et quand j’étais enfin portée par la beauté de ses images, paf, il me ramenait illico dans l’action et le réel prosaique.
Cela m’a beaucoup fait rire et je suis ravie de cette lecture !