Un #lundipoésie simple et bon avec les mots de Christian Bobin dont j’ai lu et relu les textes jusqu’à plus soif. J’en connais la rythmique presque par cœur, les chemins de traverses et les arrêts obligatoires. Parfois cette écriture me lasse, m’agace. Elle est tellement toujours la même, tellement lyrique dans sa simplicité. Mais j’y reviens encore […]
« Je ne me souviens pas de la voix de mon père, de son regard ni même de ce que pouvait bien être l’entendre rire ou partager un bon repas à ses côtés. C’est peut-être la raison pour laquelle j’ai trouvé à loger mon squelette dans le corps des lettres tracées une à une dans des […]
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« Kersten le rassure. Alors Himmler va plus loin dans l’abandon, la confession. Sa souffrance n’est pas seulement physique. Il a honte de lui-même. Il cache sauvagement ses sueurs, ses nausées, ses crampes. Il faut que personne, dans son entourage, ne puisse même les soupçonner.− Mais pourquoi ? s’étonne Kersten. Être malade n’est pas un déshonneur. […]
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« Ce n’est pas parce qu’elle est vraie et dure par moments, ni même parce qu’elle finirait mal, que ce n’en est pas une ; toutes les vies sont des aventures extraordinaires, pour qui peut les voir dépliées devant soi.« Une femme est morte. Elle était pleine de vie, pleine d’amour et pleine de rage. Elle était […]
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« Cent fois, j’avais retourné cette question dans mon esprit. Sans voir qu’elle était mal posée, dès le départ. Ce n’est pas mon attirance à moi qu’il fallait interroger, mais la sienne. » Une toute jeune fille de 13 ans tombe en admiration puis sous la coupe et l’influence d’un homme de lettres quinquagénaire. Ce prédateur manipulateur […]
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« Combien sont-ils aujourd’hui, peut-être huit mille personnes qui vivent là sur les sièges éventrés des Fiat et des Renault hors d’usage, sur les coffres ouverts prolongés par une tôle ou une bâche pour gagner un peu d’espace. Une ville de miséreux, impensable ici et aujourd’hui, et pourtant, les crises économiques successives ont eu raison des […]
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« On avait encore quelques étés pour que les visages soient rouges, pour que le sang nous frappe les tempes et fasse battre en nous le temps qu’il nous reste. On avait encore de quoi vivre un peu. C’était comme quelques carcasses qui nous tournaient autour, avec chacune ses petites mouches et leur baluchon de tristesse. […]
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« En feuilletant un peu la pièce de William Shakespeare je sais aussi que je pourrais trouver cette phrase, prononcée par un naufragé : « Celui qui meurt a payé ses dettes. » Je ne sais pas si c’est vrai. Certaines dettes sont beaucoup trop élevées pour qu’on en vienne jamais à bout.« Un été à Marseille. Deux […]
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A paraître en Janvier 2020. « Le canapé notamment, sur lequel personne à ce jour n’a réussi à s’étendre (pour y lire, par exemple) sans s’endormir aussitôt. Impossible de nier : le velours frappé des coussins laisse des empreintes accusatrices sur les joues (oui, les deux joues, lorsqu’on s’y retourne sans se réveiller) de ceux qui […]
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« Sa vraie personnalité, enfin débarrassée des hardes puantes de l’alcool, était ressortie: un contemplatif fin mais gauche, gentil mais brutal, généreux mais autocentré, dévoré par l’anxiété et la timidité, incroyablement empêché. Un touriste de la vie. Contre toute attente, le monstre était humain, vulnérable, attachant. » L’auteure nous raconte son père tout juste décédé : le […]
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« Elle voudrait vivre dans sa poche, tout au fond, toute minuscule bien au chaud, ne respirer que dans les plis de sa chemise, être à son service, tout à ses désirs, ne jamais le quitter, comme une tique, comme une fée, être à lui, être lui.« Raconter Frida Khalo c’est forcément un délice tant sa […]
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A paraître le 3 Janvier 2020. « J’ai su que la réalité n’existait plus et que nous étions tous emportés par le fleuve furieux et doux de la fiction, qui s’emparait de nos vies, de nos consciences, de nos espoirs et de nos rêves comme un tyran mielleux, travaillant à notre bonheur, pourvoyant à notre sécurité, […]
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A paraître le 31 Décembre. « Peu à peu, les chemins s’effaçaient sois les amas de bois mort, les trajets n’étaient que de longs enjambements et de longs détours. Tout était sec et brûlé. Tout était gris et jaune et brun. Parfois Corentin s’arrêtait devant une ronce calcinée, touchait les épines qui tombaient. En haut des […]
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« J’étais hantée par la question professionnelle depuis mes neuf ans. Elle m’était une angoisse sans nom… J’étais obsédée par les rapports de force. Je ne voulais pas exercer d’autorité ni en subir et je ne voulais pas de pouvoir, j’étais obnubilée par l’idée de trouver une profession qui me positionnerait à la fois ni au […]
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« Pourquoi, sous prétexte que j’ai un utérus, dois-je porter une telle responsabilité ? Le père du bébé aurait fait une bien meilleure mère. Son instinct de sacrifice est plus développé, et c’est toujours lui qui fait les crêpes. » Une femme nous raconte sa grossesse et sa maternité avec humour et cynisme; à la fois pour […]
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« Nous voilà arrivés au Bop-cha. C’est ma chère Rosette, exactement ce que tu peux imaginer d’une boîte de jazz, à New York. Dehors, il était 19heures 30. Dedans, déjà 4 heures du matin…« J’ai retrouvé avec grand plaisir les pensionnaires de la Maison Giboulées, leurs amours, leurs rêves, leurs luttes… le tout emmené par l’esprit […]
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Un deuxième #lundipoésie en farfouillant dans les manuels scolaires d’une maison de famille….J’ai choisi le poème de Victor Hugo « Oceano Nox » pour plusieurs raisons :– son premier vers m’est resté en tête depuis ma première lecture il y a plus de 20 ans– nous partons quelques jours à la mer, c’est un très grand plaisir toujours teinté […]
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« Il se sentait la peau de Christophe Colomb et d’Amerigo Vespucci. L’impression d’être dans le courant, en plein milieu, de vivre l’inédit du monde; et cet inédit ne pouvait se produire qu’ici, à New York, il en avait maintenant la certitude. » Un jeune français atterrit par une « erreur » linguistique dans une pension réservée aux jeunes […]
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Un #lundipoésie après un dimanche à ramasser des marrons… Les poèmes d’Albert Samain sont parfois un peu trop lyriques à mon goût mais j’aime tout particulièrement celui-ci (Automne) dont je vous partage un extrait. « Le vent tourbillonnant, qui rabat les volets,Là-bas tord la forêt comme une chevelure.Des troncs entrechoqués monte un puissant murmurePareil au bruit des mers, […]
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« Il s’enfermait dans un silence de plus en plus lourd, de plus en plus compact, un silence qui, terré tout au fond de son ventre, avait commencé de grandir comme une tumeur maligne, prenant peu à peu possession de sa poitrine, de ses poumons, de sa gorge, de son crâne.« Au tout début des années […]
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« Bouffée d’air glacial. Neige. Éblouie, je contemple le monde devenu entièrement blanc. Tout est soudain parfaitement beau et calme. Ne plus bouger, mourir ici. Les flocons se posent avec une telle délicatesse sur mon corps. Bientôt, j’en suis recouverte, et c’est comme d’entrer de plain-pied dans l’absence.« Une femme erre dans les terminaux de Roissy, […]
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« Mon vieux moi pose sa main sur mon visage. Sa chaleur parcourt mon corps. Il me prend dans ses bras de géant et murmure : ‘Mes amis d’enfance, de la neige, sont les flocons et, chaque hiver, mes amis d’enfance reviendront.« Phérial n’a que 4 ans lorsqu’il est placé dans un orphelinat. Commence alors un […]
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« C’est vrai ça. Avant il n’y a rien. Et puis toute cette vie qui soudain apparaît, évidente, puissante, pleine d’aujourd’hui, impatiente de demain.« Martin est jeune adolescent. Il choisit, parce qu’il adore les bébés, de faire son stage dans une crèche. Il tombe amoureux et, presque sans y prendre garde, devient père au début de […]
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« Que vas-tu faire des livres ? – Le propriétaire veut que je les jette. – Les jeter ? Tu ne vas pas les jeter. Jeter des livres ? Tu te rends compte de ce que tu dis ? – Qu’est-ce que je peux faire d’autre ? – Donne-les, garde-les, peu importe mais ne mets pas des livres à la poubelle.« En 1935, à Alger, […]
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// EN VACANCES // « Je sentais, je voyais, je touchais mon crime. Il ne tenait pas tout entier dans ce hideux nid de vipères : haine de mes enfants, désir de vengeance, amour de l’argent; mais dans mon refus de chercher au-delà de ces vipères emmêlées. » Un vieil homme sur le point de mourir confesse […]
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// EN VACANCES // « L’angoisse s’empare de tout votre être, une angoisse aussi fulgurante que celle du rêve. Est-ce cela, d’être mort ? Les lèvres essaient de parler, la bouche est paralysée. La bouche ne forme pas de paroles quand elle est sèche, qu’elle n’a plus de salive. Et le regard part à la dérive, […]
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// EN VACANCES // « Il semble que l’être humain s’épuise aux yeux de l’autre, comme s’épuisent les gisements d’or. On ne trouve plus d’or en l’autre, alors on le quitte. Tandis qu’il aurait fallu, peut-être, creuser seulement un peu plus loin, partir en quête d’un autre filon. » Un journaliste quadragénaire tombe follement amoureux d’une jeune […]
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// EN VACANCES // « La nature, c’était une idée différente pour un fils de paysan comme lui. Les paysans savent à quelle vitesse leur trace s’efface. La terre est un outil de travail qui donne tant qu’on a la force de le faire. Il reconnaissait que les dégâts mécaniques risquaient de pourrir la vie, mais […]
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« Un instant infime, tout appliqué qu’il était à écrire, il s’est cru libre. Libre de pouvoir descendre sur les quais, pour aller saluer Clément au Bistrot des Augustins. Prendre un verre même peut-être. Il en est tout étourdi. Il a cru qu’il était libre. Il a cru aux arbres derrière la fenêtre, aux péniches, aux […]
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« Je voulais juste museler ce monstre qui mord au ventre. Ce monstre, on l’appelait le désir. J’avais quinze ans et je n’en savais rien. On ne m’avait pas appris ce mot. Le lit de mes parents n’était jamais défait. Tout était en ordre, les machines tournaient toutes dans le même sens. Elles virginisaient les vies […]
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« L’après-midi, Marlène marchait. Elle remontait le cours de la rivière ; elle allait au long des plateaux d’herbe rase. Cette marche hors des routes, hors les sentiers des hommes, par tous les temps, pour rien, sans fusil, sans chien, seule, suffisait à la signaler à l’attention de tous, à l’isoler ; plus encore que le […]
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« De temps en temps, au détour de la conversation, il évoque la mémoire des disparus, toujours pour rappeler un souvenir joyeux, un moment agréable. Il leur arrive même d’en rire aux larmes. C’est sans doute cela qu’Hermès admire le plus chez son maître : cette volonté farouche de ne jamais donner prise au chagrin, ce […]
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Un #lundipoésie à ma façon avec le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert, petit bijou de poésie et d’ironie… Il s’agit de la compilation des tics de langage d’un milieu content de lui et aux idées étriquées. Ce projet inachevé, entamé en 1847, sera publié trente ans après la mort de l’auteur et reste d’une actualité […]
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« Je me moquais un peu du contenu des livres. Ce que je recherchais surtout, c’est le pouvoir qu’ils m’accordaient. J’arrivais grâce à eux à m’abstraire de ma vie. J’oubliais le Centre, sa routine et son lot de contraintes épuisantes J’oubliais qu’on m’avait confisqué ma maman. J’étais ailleurs, loin du monde, loin de moi. C’est parfois […]
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« Elle me sortait d’un monde où je n’avais pas vécu pour me lancer dans un monde où je ne vivais pas encore.« Thérèse et Isabelle sont lycéennes. Leur inimitié bascule soudainement et elles explorent entre les cours leur passion amoureuse et physique. C’est la découverte du désir fou et l’apprentissage du plaisir mutuel.Un texte très […]
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« Qu’on l’accepte ou non, résoudre une affaire criminelle revenait toujours à faire son deuil. Deuil de ce suspect devenu coupable, dont on avait fini par faire un acteur familier de sa vie. Deuil de toutes les pistes qu’on avait suivies avant de les abandonner. Deuil de ces détails qui, en dépit de l’image d’ensemble qui […]
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« J’ai envie de me mettre à boire. Avec application et détermination. Comme lorsqu’on s’attelle à une nouvelle tâche. Comme lorsque, au printemps, on sort sa tondeuse pour procéder à la première coupe de la saison. J’ai envie de me mettre à boire sans but précis, sans cause ni raison, sans désir d’oublier qui ou quoi […]
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« J’en ai eu assez, j’aurais voulu dire assez et crier assez, et dire toujours vous fabriquez les morts, vous fabriquez sa mort pour qu’elle vous convienne juste, juste qu’elle soit taillée à vos mesures et donne à vos vies le relief qu’elles sont, seules, incapables de modeler. » Un homme s’est donné la mort. On plonge […]
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« Je lui ai promis que personne en saurait rien, que ce serait notre secret, que les mots c’était la seule chose qui pouvait sortir libre de mes doigts. » Dans un accès de désespoir, un père vend l’aînée de ses filles à un homme puissant et sans morale, voulant croire que cela offrira au restant de […]
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Un #lundipoésie tendre et filou avec un poème de Rimbaud que j’aime énormément pour sa capacité à évoquer simplement la légèreté amoureuse … Écrit alors que l’auteur avait tout juste 16 ans il est parfait aussi pour les élans printaniers ! Rêve pour l’hiver « L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose Avec des coussins […]
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« La nuit s’est creusée comme une vasque et l’espace de la cuisine se met à respirer derrière un voile fibreux. J’ai pensé à la matière silencieuse qui s’échappe des noms, à ce qu’ils écrivent à l’encre invisible. A voix haute, le dos bien droit, redressée sur ma chaise et les mains bien à plat sur […]
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Un #lundipoésie poignant et plein de vie avec des textes de Jean Cayrol, résistant déporté à Mauthausen et revenu porté par « l’étrange privilège d’être né deux fois ». Cette anthologie est publiée par @editionspoint et comporte des poèmes très touchants porté par une grande foi dans la vie. J’ai choisi de partager avec vous un texte écrit à […]
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« Croire à demi c’est se tromper deux fois. » Sept textes romanesques plus ou moins longs, sept OLNI intimement et subtilement liés, sept univers parallèles un peu inquiétants… sept histoires très troublantes. Entre drogue à remonter le temps, croyance aux extraterrestres, portrait de Dorian Gray réinventé, dystopie communautaire ou encore population rejetant les nouvelles technologies, ces […]
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« C’était si doux de dormir avec son enfant, les corps sont si bien relâchés de savoir qu’ils n’ont que ça à faire, dormir, et qu’ils ne risqueront pas de subir les assauts d’un homme. Les assauts d’un homme fidèle on s’y prête parfois, on se dit que c’était bien, mais ceux d’un homme infidèle, on […]
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« Quand on connaît la joie de s’oublier dans un roman, on ne peut que plaindre les malheureux qui ignorent cette félicité, les pauvres qui se soucient de mesquines choses réelles, les exclus du royaume de la phrase (…). « Deuxième lecture pour moi d’un texte de Catherine Cusset pour retenter l’expérience après L’autre qu’on adorait […]
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« Nulle profession n’est plus dangereuse – criminelle, même. Les architectes ont causé plus de malheurs que tous les soldats, tous les idéologues et tous les industriels confondus. Les urbanistes aussi. Les urbanistes ne valent pas mieux. D’ailleurs, ce sont souvent les mêmes. Ils s’en vantent, et se proclament « architecte-urbaniste », comme on dirait violeur-assassin. On les […]
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« Quand tu le couches sur le papier, alors que tu le crois gonflé de ta substance, tu découvres qu’il n’est qu’un mot inerte, pauvre, gris. Tu le refuses. Tu redescends dans la mine, creuses plus profond, cherches celui qui apparaîtra plus dense, plus coloré, plus vivace.« Dans ce texte à la fois biographique et autobiographique, […]
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« (…) Essayer de saisir le moment où l’on s’endort, sentir le poids de son corps recru de fatigue dans le lit, être reçu à un examen, dormir sur l’épaule de quelqu’un, participer à une liesse populaire, voir un beau feu d’artifice (…) » L’anthropologue partage ici une sorte de mélopée presque incantatoire, une ode aux petits […]
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Après avoir lu « En nous beaucoup d’hommes respirent » de Marie-Aude Murail, ce #lundipoésie est évidemment dédié à Apollinaire le ténébreux, l’amoureux séducteur, le soldat poète.Il était très dur de choisir entre les poèmes qui sont chers à mon cœur.Je vous propose finalement ‘Nuit Rhénane’ extraite du recueil Alcools et qui s’accorde particulièrement à mon humeur du moment… […]
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«Paula s’avance lentement vers les plaques de marbre, pose sa paume à plat sur la paroi, mais au lieu du froid glacial de la pierre, c’est le grain de la peinture qu’elle éprouve. Elle s’approche tout près, regarde : c’est bien une image. Étonnée, elle se tourne vers les boiseries et recommence, recule puis avance, […]
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