Station Eleven, Emily St. John Mandel
Traduit de l’anglais (Canada) par Gérard de Chergé.
« Il savait, depuis longtemps déjà, que les changements intervenus dans le monde étaient irréversibles, mais cette prise de conscience n’en jetait pas moins une lumière plus crue sur ses souvenirs. La dernière fois que j’ai mangé un cornet de glace dans un parc ensoleillé. La dernière fois que j’ai dansé dans une boîte de nuit. La dernière fois que j’ai vu un bus circuler. La dernière fois que je suis monté dans un avion qui n’avait pas été converti en habitation, un avion qui décollait vraiment. La dernière fois que j’ai mangé une orange.«
Un vieil acteur très connu meurt sur scène en incarnant le Roi Lear.
En même temps, une grippe venue de Géorgie dévaste l’humanité en quelques semaines et laisse un monde à réinventer pour les quelques survivants.
Ce très beau récit dystopique alterne ensuite entre fragments du monde d’avant autour de la figure de l’acteur et tableaux du monde d’après autour d’une troupe de musiciens et comédiens jouant du Shakespeare.
J’ai été très émue par ce livre, sa poésie, sa mélancolie. Le récit est rythmé par des événements qui construisent une ‘aventure’ mais le livre fonctionne surtout comme une sorte de méditation. Le regard sur le monde d’avant est à la fois critique et très doux. Et le monde d’après, même très dur ou angoissant, voit persister un amour de l’art et de l’imaginaire qui donne espoir.
Ce livre est vraiment important à mes yeux.