L’usine, Hiroko Oyamada.

L'Usine

Traduit du japonais par Silvain Chupin.
Editions Bourgois

L’Usine structure la vie et les souvenirs des habitants d’une région où le chômage sévit fortement. Les enfants y font des excursions, les adultes espèrent y trouver un travail. L’Usine s’étend sur un terrain immense traversé par un fleuve et comportant une forêt. Corbeaux, cormorans et ragondins d’apparence légèrement inquiétante s’y reproduisent.
Trois personnes sont embauchées comme par chance sur ce site industriel. Une contractuelle qui s’occupe à détruire quotidiennement des documents à la broyeuse, son frère qui corrige des documents improbables et un biologiste spécialiste des mousses qu’on a chargé de végétaliser les toits.

J’ai beaucoup apprécié l’ambiance particulièrement lourde et chargée de malaise de ce court roman. L’Usine tient sous son emprise ces trois employés dont on suit avec difficulté les réflexions tant elles sont lourdes, engluées et circulaires. L’étrange est tapi dans chaque recoin de l’Usine. Chaque interaction semble dénuée de sens, vide et potentiellement dangereuse. Les trois salariés reproduisent des gestes mécaniquement, ne savent pas à quoi peut servir leur travail et leur vie en dehors de l’Usine disparait peu à peu de leurs pensées.
L’aliénation est poussée à son comble dans la fin du roman. Fin qui m’a d’abord énervée car je l’ai vue comme une facilité mais qui, en y repensant, et juste totalement cohérente avec le reste du récit.
Une sorte de version de « Bullshit jobs » de David Graeber mais nourrie d’un imaginaire japonais inquiétant à souhait.