Adieu Kenneth White
Il y a dix jours disparaissait un poète que j’apprécie beaucoup : Kenneth White. A la fois assez intello et profondément sensible à la nature, il écrit une poésie qui – pour moi – se révèle de lectures en lectures.
Je vous propose deux textes issus du recueil « Un monde ouvert, anthologie personnelle » publié Editions Gallimard.
Autobiographie (traduit de l’anglais par Philippe Jaworski)
« Je suis passé par plusieurs institutions
j’ai claqué quelques portes
j’ai connu des vies et des amours
Dont il me reste quelques marques
je suis allé jusqu’au bout de la poésie
jusqu’à l’espace où l’esprit s’éclaire –
à présent j’avance hors de toute image
me suive qui ose le faire.«
Adieu à une île (traduit de l’anglais par Marie-Claude White)
« Je me souviendrai du sentier
aux premières lueurs du matin
bordé de rudes cactus bleus et de suaves frangipaniers
qui dévalait vers la baie
je me souviendrai du cliquetis des galets de corail
je me souviendrai du chœur des mouettes rieuses
des plongeons des pélicans
des silencieux passages de poissons
de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel
je me souviendrai du vent chaud
je me souviendrai des ciels du soir
des grandes traînées de rouges à travers le vert
et de la lumière qui lançait ses éclairs d’argent
là-bas au sommet du promontoire
je me souviendrai des brusques bourrasques
mais ce dont je me souviendrai le mieux, peut-être, est ceci :
le cri grêle et strident de la crécerelle
au-dessus de la brousse.«