Hangsaman, Shirley Jackson.

Hangsaman

Traduit de l’anglais par Fabienne Duvigneau.
@editionsrivages

« S’il existait une quelconque explication à pareil sentiment, c’était cet élan poétique qui la poussait à produire les textes gênants qu’elle cachait dans son bureau ; le fossé séparant la poésie qu’elle écrivait et la poésie contenue en elle était, pour Natalie, un mystère insoluble.« 

Natalie Waite a 17 ans, une mère un peu dépressive, un frère absent et un père aussi envahissant qu’il est content de lui. Elle s’apprête à quitter ce foyer familial un tantinet étouffant pour partir à l’université, la tête chargée de tout ce que son père y a fourré.
Jeune fille sérieuse et pleine d’aspirations, habituée à écrire ses sentiments quotidiens, elle s’évade souvent au gré de ses pensées et ne distingue pas toujours nettement la réalité. Elle décide ainsi d’effacer un événement violent et s’attache à faire de l’université un moyen d’émancipation.

J’ai retrouvé avec plaisir l’ambiguïté de l’écriture de Shirley Jackson et son regard inquisiteur et sans pitié sur la normalité américaine des années 40/50.
Natalie Waite est une créature : celle d’un père qui se prend pour Pygmalion, la bonne élève introvertie à la merci des meneuses qu’elle veut satisfaire, la solitaire qui doit servir de témoin au désespoir des autres et, bien sûr, celle de l’autrice qui joue avec son trouble et le nôtre.
Mais, et c’est ce que j’ai énormément apprécié dans ce roman d’apprentissage, elle est également sa propre créature. Elle s’invente d’autres personnalités et d’autres réalités, se fait commentatrice intransigeante de sa propre vie et ne cesse d’exercer l’acuité de son esprit en écrivant.