Je ne dis rien de toi que je ne vois pas en toi, Eliana Alvez Cruz.
Traduit du portugais (Brésil) par Daniel Matias.
Editions Tropismes.
« Après avoir conquis sa liberté, elle choisit de s’appeler simplement Vitória, car c’est ainsi qu’elle se voyait : victorieuse. Vitória se considérait comme quasi invincible. Peu de gens cheminant sur Terre avaient vécu cinq existences en une seule, tout en échappant à tant de périls.«
XVIIIème siècle, Rio de Janeiro. La ville est prospère et nourrit généreusement ses colons portugais. Deux familles notamment – les Muniz et les Gama – font figures de références tant pour leur sens du commerce que pour leur respectabilité chrétienne. Elles vont d’ailleurs bientôt unir leurs enfants, Felipe et Sianinha, pour consolider leurs revenus et leur influence.
Las, chaque famille a ses secrets. Le plus énorme au premier abord est que le beau Felipe est épris de Vitoria, ancienne esclave née homme et devenue prêtresse aux pouvoirs fascinants.
Lorsque l’Inquisiteur arrive du Portugal pour s’assurer que les bénéfices des nouveaux filons d’or repérés dans le Minas Gerais reviennent bien à la couronne, il décide bien sûr de s’atteler à découvrir ce que chacun cache. Les Gama commencent alors à recevoir des menaces anonymes …
J’ai profondément aimé ce roman dont j’ai progressivement perçu la profondeur et l’ampleur.
Divulguant ce qui se trame derrière chaque rapport de domination (les colons envers les esclaves, les chrétiens envers les juifs et les païens, les riches envers les pauvres, les blancs envers les noirs, les hommes envers les femmes, les vertueux envers les joyeux …) l’autrice creuse jusqu’à l’os.
J’ai trouvé l’écriture somptueuse, à la fois orale et vibrante, poétique et résistante.
Et ce titre ! Quelle beauté !