La poésie de Nicanor Parra.

Pour ce #lundipoésie je suis sous le soleil de Malaga avec une amie très chère !
Du coup je souhaitais mettre à l’honneur des poèmes écrits en espagnol : c’est une bonne occasion pour partager avec vous ma découverte du poète chilien Nicanor Parra.
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Ce poète, mort l’année dernière, était aussi mathématicien et physicien. Il écrit en se jouant des conventions. D’une écriture incroyable : vibrante, rageuse, moqueuse, délirante et pleine d’images frappantes.
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J’ai choisi pour vous le poème « Le pèlerin » extrait du recueil Poèmes et Antipoèmes.
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« Votre attention, mesdames et messieurs, un moment d’attention;
Tournez un instant la tête vers ce côté-ci de la république,
Oubliez pour un soir vos affaires personnelles,
Le plaisir et la douleur peuvent attendre à la porte :
Une voix se fait entendre de ce côté-ci de la république.
Votre attention, mesdames et messieurs, un moment d’attention!
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Une âme qui a été en bouteille pendant des années
Dans une espèce d’abîme sexuel et intellectuel
S’alimentant à peine par le nez
Désire que vous l’entendiez.
Je désire que l’on m’informe sur quelques matières,
J’ai besoin d’un peu de lumières, le jardin se couvre de mouches,
Je me trouve dans un état mental désastreux,
Je raisonne à ma manière;
Pendant que je dis tout ça je vois une bicyclette appuyée contre un mur,
Je vois un pont
Et une automobile qui disparait entre les immeubles.
Vous vous coiffez, c’est sûr, vous vous promenez dans les jardins,
Vous avez sous la peau encore une autre peau,
Vous possédez un septième sens
Qui vous permet d’entrer et sortir automatiquement.
Mais moi je suis un enfant qui appelle sa mère derrière les rochers,
Je suis un pèlerin qui fait sauter les pierres à hauteur de son nez,
Un arbre qui demande à grands cris qu’on le couvre de feuilles
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