Les villes invisibles, Italo Calvino.

// EN VACANCES //

Traduit de l’italien par Jean Thibaudeau.

« Je compris que je devais me libérer des images qui jusqu’ici avaient annoncé les choses que je cherchais : seulement alors je réussirais à comprendre le langage d’Ipazie.
À présent il suffit que j’entende le hennissement des chevaux et le claquement des fouets pour que me prenne un tremblement amoureux : à Ipazie, tu dois entrer dans les écuries et les manèges pour voir les belles femmes qui montent en selle, cuisses nues, des jambières sur les mollets, et un jeune étranger s’approche-t-il qu’elles le renversent dans le foin ou la sciure et le pressent ferme contre leur téton. Et lorsque mon âme ne demande d’autre nourriture et stimulant que la musique, je sais qu’il faut la chercher dans les cimetières : les musiciens se dissimulent dans les tombes ; d’une fosse à l’autre se répondent trilles de flûte et accords de harpe.
Il est certain qu’à Ipazie aussi viendra le jour où mon seul désir sera de repartir. Je sais que je ne devrai pas descendre au port mais gravir le clocheton le plus élevé de la forteresse et attendre qu’un navire passe là-haut. Mais passera-t-il jamais? Il n’est pas de langage sans pièges.
 »

Un livre merveilleux ! 
Marco Polo rapporte à Kublai Khan la description des villes qu’il a visitées pour lui. Le récit se fait sous forme d’une série de contes courts autour de villes imaginaires pour rêver et philosopher… J’ai trouvé cette lecture magique : en quelques mots la ville est là avec ses bruits, ses odeurs, ses usages…quel délice que l’imagination !