Memorial Drive, Natasha Trethewey.
Traduit de l’anglais par Céline Leroy. @celine2405
Editions de l’Olivier
« C’est long, trois décennies, pour apprendre à reconnaître les contours de la perte, pour arriver à créer une intimité avec son propre chagrin. On s’y habitue. La plupart du temps, il reste distant, toujours à l’horizon, voguant vers moi avec sa pesante cargaison.«
Lorsque sa mère est assassinée par son ex-mari, un vétéran du Vietnam violent, c’est le monde de l’auteure qui s’effondre. Elle se raccroche alors aux récits de son enfance, à une certaine image de sa mère, se bat avec ses démons et son sentiment de culpabilité et essaie tant bien que mal de mettre de côté tout un pan de sa vie pour moins souffrir. Plus de 30 ans plus tard, alors qu’on lui remet le dossier de l’enquête, elle affronte enfin par l’écriture cette perte et ce traumatisme.
Ce livre est tout à la fois un exercice cathartique fin et sans pathos et une mise à nu d’un système de violence installé à l’encontre des femmes et encore plus des femmes noires.
L’auteure raconte ses parents, leur mariage biracial dans un Mississipi qui ne les a pas encore légalisés, leur amour et leur incompréhension profonde, leur façon toute différente de vouloir armer leur enfant métisse face au monde.
Elle raconte une lignée de femmes fortes, résilientes, dépassant de tous côtés les limites que leur société veut leur imposer. C’est aussi son beau-père, sa violence malsaine, l’infiltration de la peur dans le quotidien d’une vie de famille.
Elle raconte enfin comment ses rêves, ses lectures et son écriture la ramènent sans cesse à la mort de sa mère, à cette absence douloureuse.
Un livre remarquable en tout point.
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