La Supplication : Tchernobyl, chroniques du monde après l’apocalypse, Svetlana Aleksievitch
Traduit du Russe par Galia Ackerman et Pierre Lorrain.
« Je me demande pourquoi on écrit si peu sur Tchernobyl. Pourquoi nos écrivains continuent-ils à parler de la guerre, des camps et se taisent sur cela ? Est-ce un hasard ? Je crois que, si nous avions vaincu Tchernobyl, il y aurait plus de textes. Ou si nous l’avions compris. Mais nous ne savons pas comment tirer le sens de cette horreur. Nous n’en sommes pas capables. Car il est impossible de l’appliquer à notre expérience humaine ou à notre temps humain… Alors vaut-il mieux se souvenir ou oublier ?«
L’auteur a recueilli durant la dizaine d’années suivant la catastrophe nucléaire de Tchernobyl les témoignages de près de 500 témoins de cet accident. Médecins, journalistes, liquidateurs chargés de nettoyer la zone mais aussi simples mères de familles ou citoyens partagent avec leurs mots la disparition d’un monde, l’incompréhension totale de la situation et les conséquences de cette catastrophe sur leur vie.
Ils tâtonnent tous pour trouver comment raconter, tant rien ne leur permet de saisir et de faire comprendre aux autres ce qu’est devenu leur univers. Tellement similaire à celui d’avant et tellement nocif, hanté par un mal invisible qui remet en question tous les gestes simples du quotidien… Ce livre est bouleversant – j’en ai fait quelques cauchemars – mais c’est à mon avis une lecture nécessaire.
J’ai beaucoup repensé en le lisant au film prémonitoire de Tarkosvki, Stalker (tiré du bouquin du même nom de Arcadi et Boris Strougatski). La Zone du film et la zone décrite par les témoins de Tchernobyl se sont superposées dans ma tête et n’ont pas fini de me hanter.
Un immense merci @papiercrepon pour ce conseil de lecture : éprouvant mais tellement important.