Editions Tristram. Traduit de l’anglais par Bernard Sigaud.

« Pendant plus d’une heure après son retour à Argyle Terrace, Cath n’arriva pas à se réchauffer correctement. Elle pensait à sa mère, qui avait détesté l’île et le nord en général. Cet endroit, disait-elle, comme si l’appeler par son nom pouvait attirer une malédiction.« 

Cath est photographe et disquaire à temps partiel. Elle travaille sur une série de photos de lieux de crime, observe leur opacité et leur platitude déstabilisantes, persuadée que sous la surface anodine du monde se cachent parfois des mystères insondables.
Lorsqu’elle décide de partir 2 mois sur l’île écossaise où elle a passé son adolescence c’est pour aller photographier la maison de son amie Shirley dans laquelle celle-ci a été assassinée avec sa mère et son frère. Ce retour au pays la reconnecte à cette amitié et la conduit à mener l’enquête pour comprendre si le père de Shirley est vraiment l’assassin et, si c’est bien le cas, ce qui a pu déclencher ce passage à l’acte monstrueux.

J’aime intensément l’écriture de Nina Allan et sa façon sans pareille de mêler le quotidien familier (les bons voisins) avec le trouble et l’étrange (les bons voisins comme façon d’appeler les lutins et les elfes). Elle est très forte pour balader son lectorat entre sentiments réconfortants (ses descriptions de paysages, la psychologie attachante de ses personnages féminins …) et malaise profond (gestes ou actions inexpliqués, dissonance entre les perceptions des différents protagonistes …)
Ici, j’ai été fascinée par sa façon de rendre palpable ce mélange ambivalent dans sa façon de décrire la maison de Shirley (et sa réplique en bois construite par son père pour elle) avant le drame et vingt ans plus tard. La façon dont elle raconte l’enquête menée par Cath entre collecte de documents, raisonnements cartésiens, intuitions, contes et légendes locales, lui donne une épaisseur passionnante.
Un très bon roman noir !

De la même autrice j’ai beaucoup aimé La fracture, Complications et Spin.