La poésie de Constantin Cavafy

Un #lundipoésie songeur avec Constantin Cavafy, poète grec à la fois complexe et solaire. Elevé en Grande-Bretagne, il n’a rien publié de son vivant, faisant circuler ses textes auprès de ses amis, les retravaillant sans cesse, les détruisant parfois. Il a mené à la fois une vie d’apparence bourgeoise et confortable (il était fonctionnaire et courtier) et une vie marqué par le secret lié à son homosexualité.

Sa poésie amoureuse est, à mes yeux, universelle. Sa sensualité en est lumineuse. Je vous propose trois poèmes que j’aime particulièrement (dans la traduction de Dominique Grandmont).

Leur origine
« Leur plaisir coupable vient de connaître son assouvissement.
Ils se sont levés du lit et s’habillent à la hâte, sans parler.
Ils sortent de la maison l’un après l’autre, furtivement ; et comme ils marchent avec une certaine inquiétude dans la rue, on dirait qu’ils redoutent que quelque chose sur eux ne trahisse à quel genre d’amour ils viennent de céder.
Mais la vie de l’artiste n’a eu qu’à y gagner.
Demain, après-demain, ou des années plus tard, s’écriront des poèmes brûlants dont l’origine était ici.
« 
1921

Pour qu’elles viennent
« Une chandelle suffit. Sa lumière indécise,
Voilà ce qui convient le mieux, qui leur sera la plus propice
Quand viendront de l’Amour, quand viendront les Ombres.
Une chandelle suffit. Que la chambre ce soir
Reste dans la pénombre. Tout à la rêverie
Et à ce qu’elle suggère, Grâce à ce peu de lumière –
A mes visions alors Je donnerai libre cours,
Pour que viennent de l’Amour, pour que viennent les Ombres.
« 
1919 – 1933

Je suis parti
« Je n’ai pas voulu m’attacher. J’ai tout donné de moi, puis je suis parti.
Vers des jouissances qui se sont avérées à demi réelles,
en même temps que folles chimères de mon cerveau,
Je suis parti dans la nuit illuminée.
Et j’ai bu des vins âpres, comme savent
En boire les hommes de plaisir.
« 
1913